Un Beaujolais spirituel

 

 

 

ramon-dekker

 

 

Je suis dans le coin.

J’observe tout ce cirque.

 

 

 

 

Beaucoup de vignerons que j’ai rencontré s’étonnaient du manque de communication visuelle directe, dans les rues ou radio concernant le Beaujolais nouveau.

De mon côté je remercie les cieux car je ne veux plus représenter le Beaujolais Nouveau. La réputation est trop dure à supporter. Je ne parle pas des events organisés, où les gens qui sont présents sont là pour ça, mais bien sur les salons où le public vient de toute part. Comme plein de vignerons en solo, je suis en contact direct avec la rue, les méchancetés et réflexions fusent.
J’ai travaillé en vallée du Rhône pour des grands noms qu’ils soient négociants ou indépendants. J’ai beaucoup d’amis installés en bourgogne ou vallée du Rhône.
Mon expérience me montre que les grands noms ont poussé en avant leurs appellations et je remarque que le public est prêt à payer le prix sachant que l’image est là au rendez-vous. Tout le monde en profite.

 

A l’inverse j’ai l’impression qu’en Beaujolais, l’intérêt est de payer toujours moins cher. Le travail n’est pas valorisé. Je ne jette la pierre à personne mais les risques sont trop énormes en Beaujolais, les prix sont déréglés et instables. Impossible pour moi et pour la jeunesse d’être motivés à s’installer et à construire des familles.

 

Ouais bah on s’en fout de ta vie tu vois!

-Ok.

 

Nos femmes ne sont pas celles des années 60. Le Beaujolais a toujours connu des cycles de prospérité, puis de crises viticoles, d’exode rural, de réussite etc… L’économie un peu comme nos collines, ça fait haut et des bas.

La négativité ambiante est très forte. Elle tue le moral petit à petit.

Je vous alerte concernant le prix des locations des logements en Beaujolais. Les prix sont ahurissants.
Je me demande si le Beaujolais, cette terre d’accueil, accueille encore les plus petits de la société.
Je n’ai pas les moyens ni d’acheter un domaine, ni de louer 900€ par mois un truc chauffé au fioul en simple vitrage.

 

Ouais bah t’es gentil, à Paris c’est pareil!

 -Ok

A Montmelas il n’y aura plus de St Vincent puisqu’il n’y a plus de vignerons.

Les propositions de fermage en Beaujolais Villages m’ont été refusées.

Les fermages ne payent plus les impôts fonciers de mes propriétaires. On me fait des offres à la vente complètement surévaluées.

J’en ai marre de voir les bourguignons racheter nos terroirs pour rien, ou bien acheter les terroirs en cru qui les interessent.

J’en ai marre de voir la presse se masturber quand un bourguignon rachète une tranche de Moulin à vent, juste parce qu’un jour le gars a été frappé par l’esprit, révélant un intérêt certain à la dégustation d’un Morgon et d’un Moulin à Vent.

 

« Nan mais t’sais une fois la grand-mère elle avait fait un clafoutis tu vois, et là!! Sur la tête de ma mère, Pierrick il était dans la cour et il a dit: Euh ça sent le clafoutis!?

La grand-mère elle a viré, elle a dit lui c’est un sommelier, obligé. »

 

Je ne pense pas que la dernière décision du l’ODG des crus, qui consiste à se barrer de l’UVB soit un bon choix… C’est ma vision de petit con sur sa colline, mais une équipe désolidarisé ne gagnera pas de match.

J’estime que les Beaujolais et  Beaujolais Villages sont de bons défenseurs en arrière, une bonne entrée dans le match. Les crus sont de bons pivots et tireurs à 3 points.

Si ça part en cette-su, nous n’aurons qu’une armée de guerriers solitaires.

Mais une équipe de stars solitaires, ça ne fait pas une bonne équipe soudée pour affronter les tenants du titre.

En plus attention quant aux intentions de se rapprocher de la Bourgogne, à part prendre des bifles c’est tout ce qu’il va se passer. Un léger chauvinisme m’envahit mais tu m’enlèveras pas de la tête que le Beaujo n’est pas la bourgogne. T’as cru qu’ils allaient nous respecter?  Ils ont pas besoin de nous… Moi je lole.

… C’est les grands cousins, respect, mais sur la photo de famille on sent qu’on a pas la même gueule.

 

Je ne connais pas ces gens et je pense qu’il y a de la place pour tout le monde.

J’ai beaucoup de respect pour la Bourgogne, tous ces vins, ces noms, ces gueules, ces dégaines, ce prestige. Et j’apprends beaucoup quand je vais déguster là bas et ailleurs. Et j’aime bien vaner la Bourgogne quand ils attaquent mon petit gamay. Souvent je pose le scud suivant:

 

« Vous savez ce que ça fait deux bourguignons qui divorcent?

Ils redeviennent frère et soeur. »

 

Je n’oublie pas que c’est dans les caves bourguignonnes que j’ai entendu le scud:

« A Bordeaux ils ont les châteaux, en Bourgogne on a le prestige. »

 

Respect.

Je kiffe ceux qui savent encore rigoler d’eux-même, je kiffe les bonnes vanes… J’aime les grands, j’aime les petits, j’aime les bons… Même si t’es pas d’accord avec ceux que je choisis!

 

Je te promets qu’il y a de la place pour tout le monde. Et aussi j’ai vu des beaujolais villages meilleurs que certains crus, certains crus meilleurs que certains bourgognes, certains Cote d’Auvergne meilleurs que certains Beaujo Villages et certains Beaujolais meilleurs que certains crus…

C’est pas si simple.

 

 

En Beaujolais, je pense qu’on est contrasté et un peu cabossé et un peu cabochard..

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Mais t’es naïf toi. Les petits vous allez mourir. Tu veux être en indépendant? Si t’as pas de nom, t’es dead.

Tu m’insultes ou quoi?

 

Il est dommage qu’il n’y ait pas de solutions sur l’export pour faire passer en premier les jeunes qui s’installent. Par exemple qu’on soit mis en avant sur au moins un petit volume de bouteilles pour l’Europe ou les Etats-Unis.

Ouais bah t’es gentil mais tout le monde veut vendre à l’export! Y’as pas QUE toi!

Chacun sa merde tu vois!

-Ok. Mais alors qu’on ne me propose pas d’être dégusté pour des magazines américains, puisque pour être dégusté et sélectionné il faut avoir un importateur déjà établi aux US. Mais comment tu veux que je trouve un importateur si je suis pas mis en avant d’abord?

C’est comme le mec qui ne nous laissait pas rentrer en boite parce qu’on était pas des habitués… Mais comment tu veux que je sois habitué si je rentre pas au moins une fois?
Les retours presse du Beaujolais nouveau ont été discrets, et j’ai trouvé les articles 2.0 des blogeurzz  et blogueuzz assez pourave…

On en est encore à se justifier sur la 71B, le choix des levures, la banane. Que y’en a des biens!  (^^) qu’il faut savoir mettre 9 balles dans un primeur si tu veux pas être déçu! Bah oui mon gars, les bonnes choses ont un prix! …

Vas-y mais c’est bon, c’est pas la peine de les solliciter pour le Beaujolais nouveau. On s’en bat les couilles du primeur. Invite-les pour une dégust’ de crus et de beaujolais villages, un SuperFight à l’ancienne qui donne envie de se lever le matin quoi!!

Un bon vieux Dekkers – Prestia viticole. Tu vois ce que je veux dire?

 

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Invite-les à la paulée de Meursault tu vas voir si ils vont te parler des vendanges à la machine et du choix des levures, les petits blogueurz.

 

 

Je suis déçu également du prix d’achat des bouteilles sélectionnées pour le concours prestige de l’inter.

A 3€ HT la bouteille de Beaujolais primée…
C’est le prix du paquet de chips Pringles sur l’autoroute.

J’estime que mon travail d’une année de galère mérite plus que le paquet de Pringles.

On m’a dit que les belles choses ont un prix.

 

Alors OK.

Mais ça doit marcher aussi concernant mon travail et mes bouteilles.

 

J’ai l’impression qu’on nous enferme dans cette réputation basse classe ou bien sur les petits prix. Qu’on est bon qu’à produire des choses à 5€.

Il y a une époque où le Morgon valait autant que le Chateauneuf du Pape, et Fleurie plus cher qu’un Volnay.
Mes amis en Bourgogne et Vallée du Rhône ne se posent aucune question.

 

Je ne me laisse pas impressionner par les autres, je suis fier d’être du Beaujolais.
Mais il y a un problème d’identité et d’estime de soi. Je ne parle pas d’arrogance mais de fierté, simple.

 

En Capitale, j’ai entendu hurler les supporters, j’ai entendu hurler :

ICI C’EST PARIS

 

 

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LUNIK

Alors pour ma part,

ICI C’EST BROUILLY!

 

 

 

 

 

 

Je vous alerte aussi sur la dépression et le moral des viticulteurs que je croise tous les jours… Beaucoup sont prêts à se tirer une balle. Je ne sais pas qui le fera et si c’est juste paysan et français de se plaindre mais quand même.

C’est une spéciale pour ceux qui ont déjà baissé les bras et qui ont tiré le rideau.

 

Dans un mémoire de formation, je parle d’un « certain » esprit de mort et de défaite sur la région. J’ai une approche spirituelle de mon travail et de ce qui m’environne.

Le lien père-fils a été rompu ( ou gendre – beau père etc…) et c’est pour cela, en partie, que les domaines n’ont pas perduré en Beaujolais.

Peut-être que nous n’avons pas su faire fructifier la victoire sociale et la reconnaissance mondiale.

J’ai dit un mot qui a choqué mais j’assume:

« Le Beaujolais c’est le parvenu du monde viticole, la passation de patrimoine n’a pas marché. »

C’est la famille qui est au centre de tout.

Les familles ont écrit l’histoire du Beaujolais.

Les histoires de famille ont participé au craquage du Beaujolais.

Mais les derniers seront les premiers.

C’est un mec immense que l’a dit.

 

 

J’étais aide familial de 2003 à 2005, j’ai été installé avec mes parents jusqu’en 2007. J’ai été syndiqué… Ca fait 10 ans que j’entends les mêmes trucs en réunion. Sauf que les gens vieillissent et que mes souvenirs partent en lotissement.

Il parait que j’ai perdu d’avance. Mais j’en ai plus rien à foutre.

Pour l’honneur, même vaincu, je pars dans le cirque, l’épée à la main.

 

Je voulais juste partager cela.

 

 

Sincèrement.

 

David.

 

 

 

 

« Très souvent les armes y sont, mais le tueur n’y est pas,

Trop souvent les larmes y sont mais le coeur n’y est pas »

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